France : vers une santé payante pour les étrangers non européens ?
Les députés ont voté une réforme marquante : désormais, les étrangers hors Union européenne titulaires d’un visa long séjour « visiteurs » devront verser une contribution financière pour bénéficier du système de santé français. Une décision censée rééquilibrer les comptes d’une Sécurité sociale en déficit, mais qui soulève de vives questions sur l’équité, la solidarité et l’attractivité du pays.
Quelle mesure a été adoptée ?
Le 8 novembre 2025, dans le cadre de l’examen du projet de loi de financement de la Sécurité sociale (PLFSS) pour 2026, les députés ont adopté un amendement instaurant une cotisation minimale obligatoire pour certaines catégories d’étrangers hors UE. Ceux-ci, souvent retraités ou inactifs, accèdent actuellement à la protection universelle maladie (Puma) sans cotiser.
L’objectif affiché : limiter les abus supposés et faire participer financièrement ceux qui profitent du système sans y contribuer directement.
Pourquoi ce changement maintenant ?
Avec un déficit de la Sécu dépassant les 23 milliards d’euros en 2026, les pouvoirs publics cherchent des leviers de recettes supplémentaires. Or, depuis la réforme de 2016, il suffit à un étranger de justifier d’une résidence stable en France depuis trois mois, de ressources minimales et d’une assurance santé étrangère (30 000 € de couverture) pour obtenir une carte Vitale — et ensuite annuler cette assurance.
Ce mécanisme a été largement utilisé par des retraités américains, attirés par la qualité et la faible contribution du système français comparé aux coûts exorbitants aux États-Unis.
Qui est exactement visé ?
- Les ressortissants de pays tiers à l’UE
- Titulaires d’un visa long séjour « visiteurs »
- Ne travaillant pas en France
- Ne payant pas d’impôts sur le revenu en France
Les travailleurs, étudiants, demandeurs d’asile ou résidents fiscaux ne sont pas concernés.
Comment va fonctionner la nouvelle contribution ?
Le député François Gernigon, à l’origine de l’amendement, propose un modèle inspiré des mutuelles : un bouquet de soins de base accessible moyennant une cotisation fixée par décret, avec la possibilité d’ajouter des options (soins dentaires, optique, etc.).
Le montant exact n’a pas encore été défini, mais il devrait refléter une participation symbolique et proportionnelle à la durée de séjour.
Des exceptions maintenues
Malgré cette nouveauté, certaines garanties restent intactes :
- Les soins d’urgence sont toujours gratuits pour tous, sans condition.
- Les mineurs étrangers non accompagnés conservent une couverture complète.
- Les bénéficiaires de l’aide médicale d’État (AME) ne sont pas affectés — ce dispositif concerne une autre population.
Un débat sociétal en gestation
Cette mesure relance un vieux clivage : faut-il considérer la santé comme un droit universel ou comme un avantage réservé à ceux qui contribuent au système ?
Pour ses défenseurs, il s’agit simplement de responsabiliser l’accès aux soins. Pour ses critiques, c’est un recul de la solidarité et une atteinte à l’image humaniste de la France.
Le texte devra encore passer devant le Sénat. S’il est confirmé, il entrera en vigueur au 1er janvier 2026 — une date qui marquerait une rupture dans la politique sanitaire française.
