La taxe foncière va exploser pour 7,4 millions de foyers : ce qui va changer en 2026
Imaginez : votre maison n’a pas été réévaluée depuis les années 1970. Pas de mise à jour. Pas de vérification. Et pourtant, elle possède maintenant une douche, de l’électricité, et même une baignoire. Ce n’est pas un luxe. C’est devenu la norme. Et c’est précisément ce que le gouvernement va utiliser pour revoir votre taxe foncière — sans même vous demander votre avis.
Un recalcul silencieux, mais lourd de conséquences
En 2026, la Direction générale des finances publiques (DGFiP) lancera une mise à jour massive des bases foncières. Pour la première fois depuis plus de cinquante ans, les équipements de confort intégrés aux logements seront pris en compte pour calculer la taxe foncière. Même si vous n’avez jamais déclaré ces aménagements, même si vous ne les avez jamais revendiqués comme des améliorations, ils seront automatiquement ajoutés à votre surface imposable.
Quels éléments changent le montant de votre taxe ?
- Électricité : + 2 m² fictifs
- Eau courante : + 4 m² fictifs
- Baignoire : + 5 m² fictifs
- Douche : + 3 m² fictifs
- Lavabo et WC : + 1 m² chacun
- Chauffage ou climatisation : + 2 m²
Chaque ajout augmente la surface théorique de votre logement. Et chaque mètre carré supplémentaire signifie une hausse de la taxe foncière. Selon les estimations de la DGFiP, la moyenne nationale s’élèvera à 63 euros supplémentaires par an. Pour certains propriétaires, surtout dans les régions où les logements sont rénovés depuis longtemps, les augmentations pourront dépasser 200 euros.
7,4 millions de logements concernés — mais pas partout de la même façon
La réforme ne touche pas l’ensemble du pays de manière uniforme. Dans les zones où les maisons ont été modernisées plus tôt, les impacts seront plus forts. En Corse, jusqu’à 60 % des logements pourraient être reclassés. En Indre-et-Loire, ce chiffre tombe à 10 %. Les appartements en ville sont moins touchés que les maisons individuelles. Les résidences secondaires, elles, verront leur taxe augmenter aussi, ce qui alimentera les caisses des communes touristiques.
En tout, 7,4 millions de logements métropolitains ne figurent pas encore dans les fichiers comme équipés de ces commodités — alors qu’ils les possèdent. L’administration considère que ces équipements sont désormais standard. Elle n’aura pas besoin de visites sur place. Aucune déclaration du propriétaire n’est requise. La mise à jour sera automatique.
Une mesure d’équité… ou une taxe cachée ?
Le gouvernement justifie cette réforme par un principe d’équité fiscale. Pourquoi payer moins pour une maison avec douche et chauffage, alors qu’un voisin, dans une habitation identique mais non rénovée, paie plus ? La logique semble juste. Mais les critiques fusent.
La CGT finances publiques dénonce une « hausse arbitraire » fondée sur des présomptions. Pour les foyers modestes, déjà étranglés par l’inflation et la hausse des charges, cette augmentation s’ajoute à une série de pressions fiscales : la suppression progressive de la taxe d’habitation, la hausse des coûts énergétiques, les réformes de l’impôt sur le revenu. Certains propriétaires ne savent même pas qu’ils ont droit à un dégrèvement s’ils n’ont pas vraiment ces équipements. Et la procédure pour contester reste opaque.
Qui est touché ? Et quand ça commence ?
Les propriétaires concernés recevront un avis personnalisé sur leur espace sécurisé impots.gouv.fr à partir de juin 2026. Les nouveaux avis d’imposition seront envoyés à partir d’août. Si vous estimez que votre logement ne possède pas certains éléments — une baignoire démontée, un chauffage hors service, une source d’eau non raccordée — vous pourrez faire opposition. Mais vous devrez fournir des preuves. Et le délai est court.
Les collectivités locales, elles, gagneront 466 millions d’euros supplémentaires grâce à cette réévaluation. Un soutien précieux pour les communes en difficulté, mais qui risque de creuser les inégalités entre territoires. Là où les logements sont anciens et mal entretenus, les propriétaires paieront moins. Là où les maisons ont été modernisées, les ménages paieront plus — même s’ils n’en ont pas bénéficié financièrement.
Le vrai enjeu : la taxe foncière, un impôt obsolète ?
Amélie de Montchelin, ministre des Comptes publics, a reconnu en séance au Sénat qu’il fallait repenser la taxe foncière dans son ensemble. Elle a évoqué la possibilité de la relier à la valeur réelle du bien, et non plus à une surface théorique datant de la guerre froide. Une réforme plus profonde est en préparation. Mais elle prendra des années. En attendant, cette mise à jour technique, discrète et automatique, devient le premier pas d’un changement majeur.
La taxe foncière n’est plus seulement un impôt local. Elle devient un levier de rééquilibrage territorial. Et pour des millions de Français, elle va devenir plus lourde — sans qu’ils aient demandé à payer plus.
