Pourquoi le mariage d’Eva et Mustapha a-t-il été annulé par la mairie de Béziers ?
« C’est à moi qu’on a gâché la vie. » Derrière ces mots, un drame humain, une séparation forcée, et une bataille judiciaire qui résonne bien au-delà de Béziers. Eva M., 30 ans, brise le silence. Son fiancé, Mustapha B., 24 ans, ressortissant algérien sous obligation de quitter le territoire français, a vu son mariage annulé en juillet 2023. Un an et demi plus tard, l’affaire continue de faire débat — entre règles administratives, droits fondamentaux, et politique migratoire.
Un mariage stoppé au nom des soupçons
💬 « Je ne lâcherai jamais l’affaire »
La réaction d’Eva, dont le mariage avec Mustapha – un Algérien sous OQTF – a été annulé, après la comparution de Robert Ménard pic.twitter.com/Xn8A1wAk7Y
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L’été 2023 devait être un tournant heureux. Eva et Mustapha s’apprêtaient à officialiser leur union dans la mairie de Béziers. Mais Robert Ménard, maire de la ville, a refusé de célébrer la cérémonie. Motif invoqué : le risque d’un mariage blanc. Pourtant, le couple vivait ensemble depuis plusieurs mois, et la fille d’Eva appelait déjà Mustapha « papa ».
Mustapha B. était en situation irrégulière. Après un contrôle de police en août 2022 — lié à un vélo soupçonné de vol, mais finalement restitué — il n’avait pas pu présenter de titre de séjour valide. Résultat : une obligation de quitter le territoire français (OQTF) d’un an lui a été notifiée.
L’expulsion et la rupture
Quelques jours après l’annulation du mariage, Mustapha a été expulsé vers l’Algérie. Il a dû quitter derrière lui Eva et sa fille. Une séparation brutale, qui laisse des traces. « Ce n’était pas un mariage blanc », insiste Eva. « Chaque fois qu’on entend cette accusation, ça me déchire. »
Robert Ménard poursuivi devant la justice
En février 2025, le maire de Béziers a été convoqué au tribunal de Montpellier dans le cadre d’une procédure de comparution sur reconnaissance préalable de culpabilité (CRPC). Il est accusé d’avoir refusé de célébrer un mariage sans motif légal valable. Une infraction passible de cinq ans d’emprisonnement, 75 000 euros d’amende, et d’une peine d’inéligibilité.
Mais Robert Ménard a refusé de plaider coupable. L’affaire sera donc jugée en correctionnelle. « C’est le monde à l’envers ! », a-t-il réagi. « Il était sous OQTF, et c’est à moi qu’on vient chercher des poux ? »
Une plainte pour diffamation en plus
Mariage annulé à Béziers: Robert Ménard indique qu'il va se retrouver "devant le tribunal correctionnel" après avoir refusé la reconnaissance de culpabilité pic.twitter.com/LE1hX9zAZt
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L’avocate du couple, Vanessa Edberg, a annoncé une plainte contre le maire pour diffamation. Robert Ménard avait affirmé que Mustapha B. avait été condamné à six mois de prison. Or, selon son casier judiciaire, aucune condamnation n’est inscrite. Un point crucial dans cette affaire où la vérité se brouille entre rumeurs et faits avérés.
Un débat national qui s’ouvre
Au-delà du cas individuel, cette histoire éclaire une question plus large : faut-il interdire les mariages lorsque l’un des futurs époux est sous OQTF ? Le Sénat examine justement une proposition de loi en ce sens. Ironie du sort : si la mesure est adoptée, l’acte reproché à Robert Ménard pourrait devenir légal… alors qu’il serait déjà condamné pour l’avoir pratiqué.
En attendant, Eva continue de se battre. Pas seulement pour revoir Mustapha, mais pour que leur histoire ne soit pas réduite à une simple affaire administrative. « On avait construit quelque chose de vrai », dit-elle. « Personne n’a le droit de nous l’enlever comme ça. »
