Abandon parental : une adolescente contrainte de fouiller les poubelles pendant deux ans
Une affaire glaçante a été jugée fin novembre au tribunal de Vesoul, en Haute-Saône. Une mère de 44 ans a été condamnée à 15 mois de prison avec sursis pour avoir abandonné ses deux enfants pendant plus de deux années. Durant cette période, sa fille — alors âgée de 13 à 15 ans — a dû survivre seule dans un logement insalubre, sans suivi médical, sans scolarité, et souvent sans nourriture. Son quotidien ? Fouiller les poubelles pour manger, tandis que sa mère, partie vivre avec un compagnon, ne venait plus que pour déposer… des paquets de cigarettes.
Un abandon progressif, une détresse totale
Initialement, la mère rendait visite à ses enfants une fois par semaine, apportant un sac de courses sommaire. Mais très vite, ces visites se sont espacées, puis ont cessé presque entièrement. L’appartement, laissé sans entretien, s’est transformé en taudis : détritus accumulés, odeurs nauséabondes, présence d’asticots. La jeune fille, déscolarisée par peur du harcèlement, s’est retrouvée complètement isolée.
Elle a tenté de mettre fin à ses jours à plusieurs reprises. Dans ses dépositions, elle a aussi évoqué des violences physiques et verbales répétées de la part de sa mère : gifles, fessées, humiliations. Son frère, plus jeune, a fini par retourner vivre avec leurs parents. Mais elle, traumatisée, a refusé de les rejoindre.
Des négligences qui frôlent la maltraitance
L’enquête révèle un basculement tragique : les denrées alimentaires ont été progressivement remplacées par des paquets de cigarettes laissés à l’adolescente. Interrogée, la mère a reconnu avoir été « dure verbalement » et admis avoir frappé sa fille, tout en minimisant les faits. Quant au père, aux prises avec de nombreuses addictions, il a affirmé ignorer la situation, qualifiant le témoignage de sa fille d’« exagération ».
Pourtant, les preuves étaient accablantes. Le logement, visité par les services sociaux, témoignait d’un abandon grave et prolongé — une forme de négligence infantile classée parmi les pires infractions en matière de protection de l’enfance.
Une peine symbolique face à un drame humain
Le tribunal a finalement prononcé une peine de 15 mois de prison avec sursis, bien en deçà des 7 ans encourus. Aucun des protagonistes — ni la mère, ni la jeune femme désormais majeure, ni les avocats — n’était présent à l’audience du 27 novembre.
Heureusement, la victime a pu entamer un long processus de reconstruction grâce à plusieurs placements en familles d’accueil bienveillantes. Aujourd’hui majeure, elle tente de tourner la page d’une enfance volée.
Un cas qui interroge le système de protection de l’enfance
Cette affaire soulève une question cruciale : comment un tel abandon a-t-il pu durer deux ans sans intervention plus rapide des services sociaux ? Alors que les signaux d’alerte étaient nombreux — déscolarisation, isolement, signalements potentiels —, le dispositif de protection semble avoir tardé à réagir.
Dans un contexte où les cas de maltraitance infantile par négligence augmentent, cette tragédie rappelle l’urgence de renforcer la vigilance collective : voisins, enseignants, professionnels de santé. Parce que derrière chaque silence d’enfant, il peut y avoir des années de souffrance invisible.
