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Le mot qui a fait vaciller le pouvoir : quand Vautrin a confondu Zelensky et Wolinski

Une phrase. Un micro. Une ministre. Et un silence qui a parcouru la France en moins de trente secondes. Catherine Vautrin, en pleine allocution sur le soutien à l’Ukraine, a prononcé un nom qui n’avait rien à faire là : Wolinski. Pas Zelensky. Pas le président qui défend Kyiv sous les bombardements. Mais le dessinateur mort en 2015, abattu pour avoir dessiné la vérité. La confusion n’était pas un lapsus. Elle était un miroir.

Le discours qui s’est brisé sur un nom

C’était mercredi matin, dans l’enceinte du Conseil de défense. La ministre des Armées s’adressait aux hauts responsables militaires et civils. Elle évoquait la « force morale » des nations résistantes. Elle voulait citer Volodymyr Zelensky — cet homme qui, depuis le sous-sol de son ministère, parle au monde comme un général au front. Mais ce sont les mots de Wolinski qui ont résonné. « Il a osé dire ce que d’autres taisaient. Comme Zelensky, comme Wolinski. »

Le malaise a été immédiat. Un conseiller a glissé une correction à l’oreille. La ministre a souri, légèrement gênée, et a répété : « Oui, bien sûr, Zelensky. » Mais la phrase était déjà sortie. Et dans un monde où chaque mot est scruté, cette erreur n’a pas été oubliée. Elle a été partagée. Répétée. Déconstruite.

Une erreur de mémoire… ou un symptôme de désorientation ?

Les réseaux sociaux ont explosé. Certains ont ri. D’autres ont pleuré. Beaucoup ont demandé : pourquoi ce mélange ? Pourquoi ce nom-là, et pas un autre ?

Wolinski. Homme de plume. Mort pour ses dessins. Symbole d’une France qui a choisi de ne pas céder à la peur.
Zelensky. Homme de guerre. En vie. En combat. Symbole d’une nation qui refuse de disparaître.

Les deux sont des héros. Mais ils ne partagent pas le même combat. Ni le même temps. L’un est un souvenir. L’autre, une présence vivante. Confondre l’un avec l’autre, ce n’est pas juste une erreur de nom. C’est une forme d’effacement du présent au profit d’un passé qui, lui, a été sacralisé.

Est-ce que la ministre a pensé à Wolinski parce qu’elle voyait en Zelensky une figure de résistance spirituelle ? Peut-être. Mais dans un contexte où les mots sont des armes, où les allusions sont décryptées comme des signaux politiques, cette confusion a fait plus que déranger. Elle a interpellé.

Quand les élites oublient que l’histoire n’est pas une icône

Nous vivons dans une époque où les figures publiques deviennent des symboles. Des statues vivantes. Des noms qui remplacent les visages. Et parfois, dans les couloirs du pouvoir, on ne voit plus les personnes. On ne voit que les légendes.

Wolinski n’est plus un homme. Il est un mythe.
Zelensky n’est plus un homme. Il est un emblème.

Quand on confond les deux, on risque de ne plus voir les hommes derrière. Et c’est là que le risque devient réel : lorsque la mémoire collective devient une prison, et que les vivants sont réduits à des silhouettes de l’histoire.

La suite : une correction, mais pas d’excuse

Le lendemain, le ministère a publié un communiqué. « La ministre tient à réaffirmer son admiration sans réserve pour le président Zelensky, figure de courage et de détermination. Elle regrette profondément la confusion verbale et réitère son soutien total à l’Ukraine. »

La correction était claire. La forme, respectueuse. Mais la substance ? Elle a laissé un goût amer. Parce que ce n’est pas une erreur qu’on pardonne. C’est une révélation qu’on ne peut ignorer.

Qui parle encore de Zelensky comme d’un homme ? Qui le voit, non pas comme un symbole, mais comme un père, un époux, un dirigeant fatigué, qui dort dans son bureau, les yeux rouges, après avoir perdu un ami au front ?

Peut-être que cette erreur, si elle a fait mal, a aussi ouvert une porte. Sur notre propre indifférence. Sur notre tendance à transformer les vivants en monuments.