La Joconde, un mur, et un tableau : quand le Louvre devient une scène de performance
Deux jeunes Belges, un sac en papier, et un objectif inattendu
Neal Senne et Senne, deux Tiktokeurs originaires de Belgique, ne cherchent pas à choquer. Ils cherchent à observer. Leur vidéo, publiée sur TikTok, montre un déroulé méticuleux : entrée dans le musée avec un sac kraft, marche lente dans les galeries, observation des mouvements des agents, attente patiente. Leur but ? Accrocher un autoportrait — simple, presque enfantin — à quelques centimètres de la plus célèbre peinture du monde. Pas pour le voler. Pas pour le détruire. Pour le questionner.
@neal_senne Ons Schilderij In Louvre Hangen 🖼️🇫🇷 #fyp #fy #voorjou #foryou #viral ♬ origineel geluid – Neal & Senne
Comment un objet aussi banal a-t-il pu passer les contrôles ?
Le Louvre dispose d’un système de sécurité technologiquement avancé : scanners, détecteurs, personnel formé, protocoles renforcés depuis le vol des joyaux de la Couronne en octobre. Pourtant, ce petit cadre en bois, sans métal, sans électronique, sans forme suspecte, a traversé les portes comme n’importe quel sac de souvenirs. Les agents vérifient les objets dangereux, les armes, les liquides. Ils ne vérifient pas les œuvres d’art… à moins qu’elles soient énormes. Ce tableau, de taille modeste, n’était pas une menace. Il était invisible.
Le moment parfait : quand la fermeture devient une opportunité
La salle est bondée. Les groupes se pressent autour de la vitrine. Les photographes ajustent leurs cadrages. Les guides parlent à voix basse. Et puis, la voix du haut-parleur : « Le musée va fermer dans dix minutes. » C’est le signal. Les deux jeunes hommes se dirigent vers la sortie, mais s’arrêtent. L’un d’eux sort le cadre de son sac. D’un geste rapide, presque naturel, il l’accroche à un mur vide, juste à côté d’une autre œuvre du XIXe siècle. Il prend une photo. Puis, ensemble, ils s’éloignent. Sans se retourner. Sans hâte. Comme s’ils venaient de voir un tableau… et de le quitter.
Un acte artistique ou une faille ?
Le musée a retiré le tableau quelques minutes plus tard. Aucun dommage n’a été causé. Aucun visiteur n’a été blessé. Mais le silence qui a suivi est lourd. Ce n’est pas la première fois qu’un artiste utilise le Louvre comme toile. Mais c’est la première fois qu’un défi viral, porté par deux inconnus, met en lumière une vulnérabilité systémique. La sécurité muséale repose sur la prévention des menaces visibles. Elle ignore souvent les menaces invisibles : celles qui viennent de la banalité.
Les réactions : humour, inquiétude, et une question qui revient
La vidéo a été vue plus de 12 millions de fois en deux jours. Les commentaires oscillent entre rires et inquiétudes. « C’est drôle, mais ça fait peur », écrit un internaute. « Si un tableau peut entrer, pourquoi pas un couteau ? » rétorque un autre. Pour les spécialistes de la sécurité culturelle, cet épisode n’est pas une blague. C’est une leçon. Les systèmes de protection sont conçus pour arrêter les voleurs. Pas les spectateurs qui veulent parler.
Et si ce défi était une métaphore ?
La Joconde sourit. Toujours. Elle a vu passer les guerres, les révolutions, les réformes. Aujourd’hui, elle est entourée de téléphones, de selfies, de contenus viral. Ce petit tableau, accroché à son côté, n’est pas une insulte. C’est une question. Dans un monde où tout est partagé, où tout est montré, où tout est commenté… que reste-t-il de l’art ? Et qui décide ce qui mérite d’être protégé ?
Le Louvre ne répond pas. Mais le public, lui, parle. Et ce n’est peut-être pas la pire des réponses.
