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« Fanatique musulman » ou « terroriste » ? La députée Nathalie Oziol enflamme le débat sur Samuel Paty

Refuser de qualifier l’assassin de Samuel Paty de « fanatique musulman », c’est jouer avec le feu dans la France d’aujourd’hui. Pourtant, c’est exactement ce qu’a fait Nathalie Oziol, députée insoumise de l’Hérault, lors d’un échange privé en juin 2024. Ses propos, révélés par Libération en novembre 2024, ont immédiatement déclenché une tempête politique. Pas tant parce qu’elle nie le caractère terroriste du meurtre, mais parce qu’elle refuse d’y voir d’abord une affaire de religion — et y voit surtout un échec institutionnel.

Un propos nuancé, une réception explosive

Interrogée par un membre d’un groupe WhatsApp local intitulé « Oumma Montpellier », Nathalie Oziol conteste la formulation employée par le maire socialiste Michaël Delafosse après l’attentat : « C’est un fanatique musulman qui a tué Samuel Paty. » Selon elle, cette expression « amalgame tout ». Elle insiste : le vrai drame, c’est que l’enseignant avait alerté ses supérieurs et n’avait reçu aucune protection. « Il a été laissé seul », martèle-t-elle.

 

Ses mots ne nient pas la dimension islamiste du crime — Abdoullakh Anzorov avait revendiqué son acte au nom du prophète —, mais elle refuse d’en faire le cœur du récit. Pour elle, le problème est structurel : manque de moyens, hiérarchie défaillante, Éducation nationale en souffrance. Un angle qui divise profondément.

Montpellier, terrain miné entre laïcité et communautarisme

Le contexte local explique en grande partie l’explosion médiatique. Montpellier est une ville où les tensions autour de la laïcité sont constantes. Michaël Delafosse, élu en 2020, a multiplié les gestes symboliques, comme la projection des caricatures de Charlie Hebdo sur l’hôtel de région. Une posture perçue comme protectrice par les uns, provocante par les autres.

Dans ce climat, les liens de Nathalie Oziol avec des figures locales de la communauté musulmane alimentent les soupçons d’instrumentalisation électorale. LFI, qui la présente comme tête de liste pour les municipales 2026, se retrouve accusé de clientélisme communautaire — une accusation que le mouvement rejette avec force.

Une fracture nationale révélée

Les réactions ont fusé bien au-delà de l’Hérault. Le député RN Kévin Pfeffer y voit la preuve d’un « aveuglement de LFI face à l’islamisme ». Du côté de la majorité, Charles Rodwell (Renaissance) parle d’un « déni réel ». Même dans la gauche, les critiques fusent. La députée socialiste Fanny Dombre-Coste accuse Nathalie Oziol de « confondre campagne électorale et clientélisme ».

La famille de Samuel Paty, elle, ne mâche pas ses mots. Par la voix de son avocate, elle dénonce des propos « indignes d’une représentante de la nation » et rappelle que le fanatisme musulman « a un nom, une doctrine et des victimes ».

LFI contre-attaque : « On déforme nos propos »


Face à la polémique, la France insoumise riposte. Manuel Bompard accuse Libération d’avoir tronqué la vidéo. « Elle ne nie pas l’islamisme, elle dit que les alertes de Samuel Paty n’ont pas été prises au sérieux — et que c’est ça, le vrai scandale », explique-t-il.

Pour LFI, il s’agit de refuser la stigmatisation des musulmans tout en dénonçant les failles de l’État. Mais dans un pays marqué par plusieurs attentats au nom de l’islamisme radical, cette nuance passe mal. Et devient presque inaudible.

Un débat qui dépasse Montpellier

Au fond, cette affaire résume un dilemme français récurrent : comment nommer le mal sans stigmatiser une communauté entière ? Comment défendre la laïcité sans tomber dans l’excès ? Et comment protéger les enseignants sans sacrifier la nuance ?

À l’approche des municipales 2026, la polémique autour de Nathalie Oziol n’est pas seulement locale. Elle interroge la capacité du débat public à accueillir des discours complexes dans un temps de polarisation extrême. Et elle montre, une fois de plus, à quel point la mémoire de Samuel Paty reste un miroir des divisions françaises.