Scandale dans les pharmacies : La guerre des génériques éclate au grand jour
Un simple arrêté gouvernemental, publié discrètement un mercredi d’août, a suffi à mettre le feu aux poudres. Alors que la pression sur les coûts de santé s’intensifie, les pharmaciens français se retrouvent soudainement au bord du précipice. Une décision administrative, censée réduire les dépenses publiques, risque en réalité de fermer des centaines d’officines, surtout en zone rurale. Et derrière ce coup de théâtre, une colère sourde monte. Une colère que les pharmaciens s’apprêtent à faire entendre. Le 16 août, la France entendra le message : la pilule ne passe plus.
Une décision qui fait basculer les pharmacies
Le 6 août, le gouvernement a publié un arrêté modifiant les conditions des remises commerciales accordées par les laboratoires pharmaceutiques aux pharmacies sur les médicaments génériques. Jusqu’alors, ces remises pouvaient atteindre 40 % du prix de vente. Désormais, elles sont plafonnées à 30 %. Une simple ligne de texte, mais aux conséquences financières massives.
Pour Laurent Filoche, président de l’Union des groupements de pharmaciens d’officine (UDGPO), cette mesure est « incompréhensible ». Selon lui, elle ne permettra aucune économie réelle pour l’assurance maladie, mais affaiblira directement les pharmacies, déjà fragilisées par l’absence de revalorisation de leurs prestations. « Cela signifie une perte de 10 % sur une part cruciale de nos revenus », alerte-t-il. Et cette perte, ce n’est pas une option. C’est un coup dur pour des établissements qui survivent déjà à la marge.
Un système vital pour les officines
Les remises commerciales sur les génériques ne sont pas un bonus. Elles constituent un pilier économique majeur pour de nombreuses pharmacies, en particulier celles installées en milieu rural. Contrairement aux idées reçues, la vente de médicaments ne rapporte pas grand-chose en marge directe. Ce sont ces remises, négociées avec les laboratoires, qui permettent de compenser l’absence de financement public suffisant pour les services rendus : conseil, dispensation, prévention.
Sans cette manne, les comptes deviennent rapidement déséquilibrés. Et pour les officines les plus vulnérables, la fermeture devient inévitable. Selon les estimations de l’UDGPO, entre 600 et 700 pharmacies pourraient être contraintes de baisser leur rideau. Un scénario catastrophe pour l’accès aux soins, surtout dans des territoires déjà touchés par la désertification médicale.
Un lobby pharmaceutique en coulisse ?
Les pharmaciens pointent du doigt un lobbying intense mené par les laboratoires pharmaceutiques auprès du ministère de l’Économie. Leur objectif ? Préserver leur rentabilité face à la baisse continue des prix des médicaments génériques en France. En réduisant les remises vers les pharmacies, les laboratoires gardent une plus grande part du gâteau — sans que cela ne se traduise par des économies pour la Sécurité sociale ni des prix plus bas pour les patients.
Pire encore : cette décision a été prise sans aucune concertation avec les professionnels de terrain. Aucun dialogue, aucune étude d’impact. Un passage en force que les pharmaciens refusent de subir en silence. « On nous demande de faire des efforts, mais sans jamais nous donner les moyens de les assumer », dénonce Laurent Filoche.
La mobilisation est lancée
Face à ce qu’ils perçoivent comme une injustice, les pharmaciens passent à l’offensive. Une grève nationale est annoncée pour le 16 août, avec la fermeture massive des officines pendant trois jours. Ce n’est qu’un début. D’autres actions sont prévues le 18 septembre, puis tous les samedis à partir du 27 septembre. Le message est clair : le réseau d’officines, pilier de proximité du système de santé, ne se laissera pas saigner sans réagir.
Cette mobilisation s’inscrit dans un contexte plus large : pénuries de médicaments, pression sur les coûts, départs à la retraite non remplacés. Chaque pharmacien ferme, c’est un maillon de la chaîne de soins qui disparaît. Et dans de nombreuses villes et villages, il n’y a pas de remplaçant.