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« Je n’ai rien fait » : Squattée chez elle, elle perd 80 000 € et se retrouve en garde-à-vue

Elle voulait simplement vendre la maison de son père. Une succession ordinaire, un projet serein. Mais au printemps, en arrivant sur le Bassin d’Arcachon, Karine Lellouche a découvert que quelqu’un vivait chez elle. Pas un intrus violent. Pas un cambrioleur. Un homme qui avait installé des rideaux, branché la fibre et affirmé, calmement, que la porte était ouverte. Ce détail, minuscule à ses yeux, allait tout changer. Et tout détruire.

Une loi anti-squat… qui ne protège pas quand il n’y a pas d’effraction

La loi adoptée en 2023, portée par Guillaume Kasbarian, a permis d’accélérer les expulsions dans des milliers de cas. Elle a triplé les sanctions, introduit la résiliation automatique des baux. Pourtant, dans le cas de Karine, elle s’arrête net. Pour la justice, pas d’effraction = pas de squat. L’occupant a dit qu’il était entré sans forcer. Et les autorités l’ont cru. Le préfet a rejeté sa demande d’expulsion. Aucune preuve. Aucune possibilité de faire valoir ses droits. La maison reste occupée. Et le temps, lui, ne s’arrête pas.

Le tournant : une agression, puis une garde à vue

Des semaines passent. Les démarches s’accumulent. Rien ne bouge. Puis, en septembre, l’occupant est agressé par deux individus. L’affaire bascule. Soudain, Karine est convoquée par le parquet de Bordeaux. Interrogée. Placée en garde à vue. On lui demande si elle a organisé l’attaque. Si elle a envoyé quelqu’un. « Je n’ai rien fait », répète-t-elle, épuisée. Personne ne prouve qu’elle est impliquée. Deux personnes sont interpellées. Mais pour Karine, la suspicion est restée. Et la maison, toujours occupée.

Une vente forcée : 80 000 euros perdues

Sans autre issue, elle accepte de vendre. Mais le promoteur, qui avait signé une promesse de vente avec la clause de logement libre, lui retire 80 000 euros du prix. Ce n’est pas une négociation. C’est une perte imposée. Pourquoi ? Parce que la loi ne lui permet pas d’obtenir la jouissance de son bien. Parce que le système n’a pas su protéger une femme qui a tout fait dans les règles. Cette somme, c’est plus qu’un montant financier. C’est le prix d’une tranquillité brisée, d’une dignité entachée.

Un système qui peine à protéger les propriétaires

Vincent Jeanbrun, ministre du Logement, reconnaît une faille. Quand un squatteur affirme être entré légalement — par un bail, une location temporaire, ou simplement une porte ouverte — la procédure devient un parcours du combattant. La trêve hivernale, les délais judiciaires, le besoin de preuves irréfutables : tout ralentit. Même avec la loi de 2023, les cas comme celui de Karine restent des angles morts. Entre septembre 2023 et mai 2024, 432 demandes d’expulsion ont été déposées dans 27 préfectures. Beaucoup ont abouti. Mais pas toutes.

Les chiffres clés de la lutte contre le squat en France

  • 432 demandes d’expulsion enregistrées entre septembre 2023 et mai 2024
  • Île-de-France concentre plus de la moitié des cas
  • 2023 : adoption de la loi Kasbarian, renforçant les sanctions
  • Trêve hivernale : période où les expulsions sont suspendues (du 1er novembre au 31 mars)

Que faire si vous êtes confronté à un squat ?

Ne jamais intervenir seul. Ne jamais entrer en conflit. La prudence est la première règle.

  • Contactez immédiatement la gendarmerie — même si la porte n’a pas été forcée.
  • Conservez toutes les preuves : photos, dates, témoins, courriers.
  • Déposez une plainte écrite au préfet — citez la loi du 27 décembre 2023.
  • Consultez un avocat spécialisé en droit immobilier — dès les premières heures.

Le cas de Karine Lellouche n’est pas un cas isolé. C’est un avertissement. Une loi peut être écrite pour protéger, mais si elle ne tient pas compte des nuances humaines, elle devient une arme contre ceux qu’elle devait défendre. Elle n’a rien fait. Pourtant, elle a tout perdu.