Explosif : Laurent Wauquiez dépose une loi pour interdire le voile aux mineures
Le débat sur le port du voile islamique ressurgit avec force en cette fin 2025. Laurent Wauquiez, président du groupe Les Républicains à l’Assemblée nationale, vient de déposer une proposition de loi visant à interdire aux mineures de porter le voile dans l’espace public. Un texte court — un seul article — mais aux implications profondes, qui modifie subtilement la loi de 2010 sur la dissimulation du visage pour y inclure la chevelure. En clair, il s’agirait d’empêcher tout parent « d’imposer ou d’autoriser » à sa fille mineure de couvrir ses cheveux dans les lieux publics.
Une initiative justifiée par la « protection de l’enfant »
Wauquiez défend son texte au nom de trois principes républicains : la protection de l’enfant, la liberté de conscience, et l’égalité entre les femmes et les hommes. Il s’appuie sur un rapport gouvernemental affirmant une « hausse massive et visible » du port du voile chez les jeunes filles, en particulier dans les quartiers populaires. Pour lui, cette pratique traduirait une pression familiale ou communautaire incompatible avec les valeurs françaises.
L’examen du texte n’aura pas lieu avant le 22 janvier 2026, date de la prochaine niche parlementaire du groupe LR. Ce calendrier laisse du temps au débat — et surtout à la polémique. Notons que le sujet avait déjà été évoqué en mai par le Premier ministre Gabriel Attal, mais sans dépôt formel de loi, et avec une restriction envisagée aux moins de 15 ans seulement.
Des juristes sceptiques sur la conformité constitutionnelle
Dès l’annonce du dépôt, des voix critiques se sont élevées du côté du monde juridique. Plusieurs spécialistes du droit public jugent la proposition hautement risquée sur le plan constitutionnel.
« Ce dispositif n’a aucune chance d’être conforme à la Constitution », affirme sans ambages la constitutionnaliste Anne-Charlène Bezzina. La loi de 2010, rappelle-t-elle, repose sur un objectif strictement sécuritaire — garantir l’identification des personnes — et ne cible aucune religion. En visant expressément une tenue religieuse, la proposition de Wauquiez violerait le principe de liberté de religion garanti par la Déclaration des droits de l’homme et du citoyen.
Le voile : contrainte ou choix personnel ?
Jean-Philippe Derosier, professeur de droit public à l’Université de Lille, se montre lui aussi « très réservé ». Selon lui, l’idée de « protéger l’enfant » est habile sur le plan rhétorique, mais insuffisante juridiquement.
« Une fillette de 9 ans peut porter le voile par mimétisme familial, mais une adolescente de 16 ans peut très bien le faire par conviction personnelle », relève-t-il. Considérer le voile comme une forme systématique d’asservissement revient à nier l’évolution de l’autonomie des mineures à mesure qu’elles approchent de la majorité.
Par ailleurs, contrairement au niqab ou à la burqa, un simple foulard ne dissimule pas le visage. Il ne pose donc aucun problème d’identification. La justification sécuritaire tombe, laissant place à une mesure perçue comme ciblant une pratique religieuse spécifique — ce que le Conseil constitutionnel a toujours refusé.
Un enjeu politique dans la course à 2027
Au-delà du strict cadre juridique, cette initiative s’inscrit clairement dans une logique de positionnement politique. Alors que la droite française cherche à se redéfinir en vue de la présidentielle de 2027, Laurent Wauquiez renforce son ancrage sur les thèmes de la laïcité, de l’islam en France et de l’identité républicaine.
Le texte, même s’il échoue à passer, sert de signal fort à l’électorat LR. Il cristallise un clivage ancien, mais toujours inflammable : celui entre liberté religieuse et ordre public. Dans un contexte social tendu, la question du voile des mineures devient moins une affaire de droit que de symboles.
Reste à savoir si le Conseil constitutionnel — ou même la majorité parlementaire — suivra. Pour l’heure, tout indique que cette proposition de loi risque de rester ce qu’elle est déjà : un détonateur médiatique plus qu’un outil législatif viable.
